L’apport de la toponymie locale

Parce que l’histoire du Limousin ne se résume pas qu’à ses sites archéologiques ou aux sources épigraphiques. L’étude des noms de lieux offre de plusieurs éléments de compréhension et éclaire certains points historiques.

Qu’est-ce que la toponymie ?

La toponymie est l’étude des noms de lieux. Cette science repose sur la recherche étymologique, la signification et l’évolution des noms de lieux habités à travers les âges. Roseline le Squère présente la toponymie comme une branche de l’onomastique permettant de comprendre l’origine des noms de lieux comme des « vecteurs d’une communication trans-générationnelle ». La toponymie apporte de nombreux éclairages à l’échelle de l’histoire locale. La survivance d’une racine gauloise ou latine dans un toponyme donne un témoignage bienvenu sur l’histoire d’un lieu. Marcel Villoutreix expose l’idée d’une pluridisciplinarité dans l’étude des noms de lieux. C’est grâce au croisement des données linguistiques et des découvertes archéologiques que l’ont peut savoir si un nom de lieu est antérieur ou postérieur à la conquête romaine.

Les noms de lieux d’origine gauloise

Jean-Michel Desbordes affirme que le gaulois a été parlé jusque vers l’an mil. Les noms de lieux ont aussi bien pu être donné à avant et après la conquête romaine jusqu’au début de la période médiévale.

Dans Les noms de lieux du Limousin, témoins de l’histoire d’une région, Marcel Villoutreix montre les formations celtiques et préceltiques des toponymes locaux. La persistance de la langue gauloise se lit dans les noms de lieux du Limousin qui s’inspirent directement de leur environnement. Ainsi, plusieurs toponymes sont des hydronymes : la Briance (Haute-Vienne), Brivancia, tient du gaulois de briva et du présuffixe latin – antia, littéralement c’est la « rivière que l’on franchit par un pont », Marcel Villoutreix suppose par là les voies antiques traversant la cité des Lémovices ; la Glane (Creuse, Corrèze et Haute-Vienne) tient du gaulois glanna, la rive. D’autres sont, ce qu’on appelle, des oronymes (nom d’un relief, d’une montagne), ainsi la ville d’Ussel (Corrèze) tiendrait son nom d’uxello désignant un site élevé, en hauteur en langue gauloise. D’autres ont une origine religieuse. Beaune (Corrèze et Haute-Vienne) est un nom issu de Belenos, dieu gaulois souvent assimilé à Apollon. Balême (Corrèze) tiendrait peut-être son nom de Belisama, importante déesse du panthéon gaulois.Il est difficile de donner une vue générale des toponymes limousins d’origine gauloise mais ils sont nombreux. La strate gauloise dans les noms de lieux renforce véritablement l’idée d’une occupation marquée sur plusieurs siècles des Lémovices.

Les noms de lieux d’origine latine

Table de Peutinger, segment 2 représentant la Gaule

La Table de Peutinger est une source non négligeable dans l’appréhension de noms de lieux d’origine latine. Dessinée à la main sur du parchemin à la fin du XIIème siècle, cette ancienne carte est une reproduction d’un itinéraire romain présentant les routes et les principales villes de l’Empire romain constitutives du cursus publicus. La Table de Peutinger donne de précieux renseignements sur les stations routières impériales et par extension sur les noms de lieux antiques. C’est grâce à elle qu’on connaît aujourd’hui les noms de Cassinomagus (agglomération antique de Chassenon) et Augustoritum (nom de la ville antique de Limoges).

Marcel Villoutreix présente plusieurs séries de noms dérivés du latin. Il en retient majoritairement un, ceux formés avec le suffixe –acum. L’historien explique que la forme –acos dérivé du gaulois préexistait avant la conquête romaine. Les noms en –acum désignent généralement des territoires agricoles, des terres cultivables ou des exploitations. Ainsi nous avons Ruffiniacum, le domaine de Rufians qui a donné Rouffignac ; Solemniacum, le domaine de Solemnis pour Solignac ou encore Saviniacum pour le domaine de Savinus donnant Savignac. Brive prend son nom à partir de Briua le pont en langue gauloise ; Tulle prend le sien de Tutela, nom d’une déesse romaine, protectrice des personnes et des lieux.

Les toponymes à la fin de l’Antiquité tardive

Le toponyme Guéret doit son nom à la fondation en 670 d’un monastère par le comte de Limoges, Waractus qui, selon Marcel Villoutreix, est issu du latin vervactum. Waractus/Varactus était un aristocrate aquitano-roman vivant à la période franque. Le « W » tiendrait quand à lui d’influence germanique. Varactus désignait probablement le site au moment de la fondation du monastère. Récemment lors d’une conférence donnée en 2019, Yves Lavalade identifiait 16 toponymes d’origine germanique (Goux, Du-breuil…), issus de la période franque ou wisigoth.

Quelques exemples

Exemples d’origine antique de noms de lieux en Limousin

Bibliographie :

ARBELLOT, François. Origine des noms de lieu en Limousin et en Périgord, éditions des Régionalismes.

LAVALADE, Yves. 2000, Dictionnaire toponymique de la Haute-Vienne, édition Lucien Souny, p. 63-64.

VILLOUTREIX, Marcel. 1999, « La toponymie limousine d’origine antique », in Bulletin de l’Association Guillaume Budé, n°1, p. 34-43.

VILLOUTREIX, Marcel. 2002, Les noms de lieux du Limousin, témoins de l’histoire d’une région, Travaux d’archéologie limousine.

Quelques origines de noms de lieux en Limousin : http://crehangec.free.fr/limo.htm

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